Bordeaux Métropole enterre le retour de l’eau en régie

Le conseil de Bordeaux Métropole a voté ce vendredi (63 voix pour, 41 contre) le principe d’affermage pour la gestion de l’eau potable et de l’assainissement. Il écarte ainsi l’hypothèse d’un retour en régie de ces services, avancée sous la précédente présidence du socialiste Vincent Feltesse.

Suite à des études comparatives des différents scenarii, l’agglomération préfère laisser leur exploitation au privé, après expiration des délégations de service public (DSP) actuelles, fin 2018 pour l’eau et fin 2021 pour l’assainissement. Le concessionnaire actuel est la Lyonnaise des eaux.

« Compte tenu de l’énorme charge de travail qu’entraîne la mutualisation, ce n’est pas le moment de gérer aussi en direct l’eau et l’assainissement, justifie Alain Juppé, président de Bordeaux Métropole. Le contrat d’affermage a l’avantage d’être de courte durée – 6 ans, contre 30 pour la DSP, et de ne pas être irréversible, contrairement au passage en régie. Et le schéma est très différent de la DSP puisque le fermier se contentera d’exploiter le réseau, les investissements resteront du ressort de la métropole. »

Au terme d’un tour d’horizon des agglomérations comparables, les élus de Bordeaux Métropole ont aussi retenu « qu’il n’y a pas de lien probant entre mode de gestion et prix de l’eau ».

Selon certaines estimations, au contraire, la facture de l’eau serait de 10% à 20% moins chère en régie. C’est d’ailleurs un des arguments avancés en conseil par Alain Anziani : selon le premier vice-président socialiste de la métropole, dans les 15 villes de plus de 100 000 habitants où l’eau est la moins chère en France, 13 disposent d’une régie.

Le maire de Mérignac fait aussi valoir que la métropole, qui va intégrer 2000 agents en deux ou trois ans avec la mutualisation des services, pourrait parfaitement intégrer les 550 salariés de la Lyonnaise concernés en 6 ou 7 ans.

La majorité Communauté d’avenir a écarté cette option. Le groupe socialiste a quant à lui voté contre l’affermage, tout comme les communistes et les écologistes. Président du groupe EELV, Gérard Chausset déplore que le « contrat léonin avec la Lyonnaise » ait fait perdre « des centaines de millions d’euros à la collectivité », jusqu’à la décision d’Alain Rousset, alors président de la CUB, de renégocier avec l’entreprise. L’élu écologiste regrette en outre la décision de la majorité précédente d’avoir préféré attendre 2019 pour passer les deux contrats en régie, quand elle aurait pu municipaliser tout de suite l’assainissement.

Publié par Rue89 Bordeaux

Martinique, Prix de l’eau : « On se moque de nous! »

L’Aduem (Association de Défense des Usagers de l’Eau en Martinique) continue à se mobiliser pour dénoncer les nouveaux tarifs du Siscm et de la SME qui placeraient les prix de l’eau pour les usagers de sud « parmi le plus élevé de France » .
L’Association de Défense des Usagers de l’Eau en Martinique (Aduem) n’en démord pas. Depuis les nouveaux contrats d’affermage en eau et assainissement passés entre le Sicsm (Syndicat Intercommunal du Centre et du Sud de la Martinique) et la SME (Société Martiniquaise des Eaux) le 1er avril, ses membres s’alarment des prix facturés à l’usager. « On se moque de nous! Le détail de la facture, qui comporte 30 lignes, est un modèle du genre. Elle reflète parfaitement la gouvernance actuelle de l’eau en Martinique qui ressemble à un mille-feuilles et coûte si cher à l’abonné » , ironise Gilbert. Pour l’association, contrairement aux éléments donnés par le Sicsm dans notre dossier du 23 juin, le prix de l’eau et de l’assainissement pour les 14 communes du sud de l’île (La Trinité au Diamant), est compris entre 5,40 euros et 6 euros le m3, selon les zones géographiques de l’île (1). « Des prix parmi les plus élevés de France! » , tonnent les membres de l’Aduem.

« DES RAISONS POLITIQUES »

« L’une des raisons du coût élevé provient de cet empilage non-justifié de différentes structures qui ont chacune des coûts de fonctionnement importants » , estime Françoise Lacy, la présidente. Réunie dernièrement à la maison des syndicats pour discuter des modalités du combat futur, l’association regrette qu’aucune des dispositions promises après les grèves de 2009 n’ait eu de suite concrète. En particulier, le syndicat unique de l’eau, « la solution pour faire baisser les prix » qui est mort-né. Il était pourtant préconisé par les services de l’État dans le rapport d’« audit sur l’eau en Martinique » rendu public en novembre 2010. « Mais aucun homme politique ne l’envisage car simplifier la gouvernance de l’eau, c’est réduire le nombre de postes de présidents, vice-présidents, directeurs de syndicats des e aux… La politique et l’eau sont intimement liées, au détriment des usagers qui payent très cher un service vital » .
(1) Tarifs TTC pour une consommation moyenne annuelle d’eau et d’assainissement de 120 m3
Publié par France Antilles Martinique, le vendredi 3 juillet 2015

Coupures d’eau illégales : comprendre les enjeux juridiques

Face au développement des coupures d’eau illégales, France Libertés et la Coordination Eau Île-de-France ont engagé des actions devant les tribunaux. Bernard Drobenko fait le point sur le contexte juridique et les condamnations des distributeurs d’eau. Un document à lire pour comprendre en profondeur les enjeux de ce combat.

Télécharger le document de Bernard Drobenko « La préservation de la dignité humaine par la condamnation des coupures d’eau » – 2015 – [PDF – FR – 8p]

Au sommaire  :
I) Des affaires caractéristiques des pratiques
II) Un contexte juridique précis
III) Une interprétation des fournisseurs d’eau condamnée
IV) La perspective de la reconnaissance du droit à l’eau

Sète: en pleine canicule, Veolia coupe l’eau à dix familles pendant 25 jours

Le 2 juillet 2015, France Libertés et la Coordination Eau Ile-de-France ont assigné Veolia à comparaitre pour coupure d’eau illégale dans un immeuble de dix familles à Sète.

La décision du Conseil Constitutionnel, en confirmant l’interdiction des coupures d’eau pour impayés, aurait dû mettre fin à cette pratique. Il n’en est rien : au mois de juin, nous avons reçu plusieurs dizaines de témoignages qui montrent que certains distributeurs dont Veolia continuent leurs pratiques irrespectueuses de la loi et des personnes.

France Libertés et la Coordination Eau Ile-de-France portent l’un de ces cas au tribunal le 2 juillet 2015. Il s’agit d’une réduction de débit dans un immeuble de Sète accueillant dix familles, comprenant en leur sein une retraitée de 98 ans et un enfant de deux ans, particulièrement vulnérables aux fortes chaleurs. Une réduction de débit dans un immeuble de deux étages n’est ni plus ni moins qu’une coupure, car avec un faible débit l’eau ne peut pas monter deux étages.

Les propriétaires et les locataires sont pris en otage par Veolia. La multinationale en litige avec le syndic de l’immeuble, a considéré qu’il était plus simple de couper l’eau plutôt que de contraindre judiciairement le syndic à respecter ses obligations. Les habitants ont ainsi subi une coupure de 25 jours en pleine période de canicule. L’alimentation en eau a été rétablie dès que l’assignation a été déposée, comme dans le cas de Bourges qui avait condamné Veolia.

Pour Veolia, la seule loi qui vaut est celle du plus fort et la prise d’otages est un moyen d’être en position de force. Quand une résidente se plaint à Veolia, le service client lui rétorque dans un courrier daté du 23 juin 2015 : « Toutefois, compte tenu des désagréments mentionnés dans votre courrier, nous vous invitons à prendre contact avec votre syndic afin qu’il régularise cette situation connue de leur service ». Les otages sont ainsi appelés à aider Veolia à recouvrer sa créance.

France Libertés et la Coordination Eau Ile-de-France demandent réparation pour cette atteinte inadmissible à la dignité de dix familles durant près d’un mois pour un dommage de plus de 140.000 euros. L’audience se tiendra au tribunal de Nanterre le 21 juillet à 9h30.
Il est urgent que Veolia comprenne qu’elle ne fait pas la loi dans notre pays et que la mise en œuvre du service public de l’eau lui impose de respecter la dignité de tous.

Les entreprises de l’eau doivent respecter la loi

Tribune d’Emmanuel Poilane, directeur de la Fondation France-Libertés, de Henri Smets de la Coalition Eau et de Jean-Claude Oliva, directeur de la Coordination Eau Île-de-France, publiée dans le Huffington Post.

Depuis 2013, les distributeurs d’eau ne peuvent plus couper l’eau des ménages pour cause de non-paiement des factures d’eau. Après avoir demandé et obtenu une clarification de la loi, après avoir perdu des recours devant près d’une dizaine de tribunaux, après avoir tenté sans succès de modifier la loi au Parlement et finalement après avoir échoué à faire déclarer la loi contraire à la Constitution, il ne reste plus aux distributeurs qu’à mettre la loi Brottes en vigueur… s’ils le veulent bien.

La Fédération Nationale des Collectivités Concédantes et en Régie (FNCCR) qui représente l’ensemble des régies et les municipalités l’a parfaitement compris et a expliqué à ses membres qu’il était désormais interdit de couper l’eau pour factures impayées lorsqu’il s’agit de la résidence principale d’une personne ou famille. La Régie Publique Noréade dans le Nord, par exemple, n’a pas attendu pour annoncer qu’elle renonçait aux coupures d’eau.

En revanche, on attend toujours que la FP2E qui représente les entreprises délégataires, notamment Veolia, Suez Environnement et Saur, fasse connaître sa position sur l’interdiction des coupures d’eau que la loi a prescrit.

Alors que nous savons que Suez Environnement a passé le message en interne pour stopper les coupures d’eau, elles continuent chez Veolia ou Saur comme si la loi n’existait pas. L’eau ne coule toujours pas chez des personnes démunies qui ont accumulé des impayés. De nouveaux ménages sont privés d’eau sans la moindre base légale et malgré la décision récente du Conseil constitutionnel. Les votes du législateur comme les décisions des tribunaux concernant les coupures d’eau restent lettre morte comme si certains distributeurs, chargés de gérer notre service public de l’eau, avaient le choix entre se conformer à la loi ou la défier tant qu’ils n’étaient pas poursuivis.

Nous lançons un appel aux élus responsables de collectivités (communes, intercommunalités, syndicats…) pour qu’ils exigent de leurs délégataires qu’ils respectent la loi. Nos organisations s’insurgent que le droit à l’eau soit cyniquement bafoué.