Le Journal de Saône-et-Loire a pu se procurer l’audit SP2000 qui pointe des dysfonctionnements dans l’ancien contrat d’eau de la ville. Explications.
Pour Guillaume Mattersdorf, directeur adjoint du pôle eau et qualité au cabinet SP2000 : « À Autun, personne ne s’est mis autour de la table suffisamment de temps en avance pour faire un point sur la situation de son contrat en délégation de service public sur l’eau. » Résultat, la ville d’Autun a perdu plus de 2,7 millions d’euros dans son ancien contrat d’eau avec Véolia selon un audit réalisé par SP2000 à la demande du Syndicat mixte de l’eau Morvan Autunois Couchois (Smemac). Un audit demandé par le bureau du Smemac le 6 mars dernier et réalisé l’été dernier, à propos de la fusion de cinq contrats d’eau de syndicat et villes de l’Autunois dans un seul, celui du Smemac à compter du 1er janvier 2014.
Les trois points sensibles
L’audit SP2000 pointe trois lacunes dans le contrôle du contrat de délégation de service public entre la ville d’Autun et Veolia.
En rejetant ses eaux de traitement d’eau potable depuis la station de Saint-Blaise dans le réseau d’assainissement de la ville d’Autun, Veolia aurait dû régler une indemnité à la ville (mais aussi à la station d’épuration gérée par… Véolia). « Véolia en tant que délégataire eau potable aurait dû verser un montant de 1,8 million d’euros à la ville d’Autun au titre de l’assainissement de ses boues de décantation, hors actualisation », souligne l’audit SP2000.
Un avenant passé en 2005 avec Véolia octroyait au délégataire de la ville une rémunération de 56 500 € HT par semestre au titre de la défense incendie (maintenance des bornes incendies en particulier). Or SP2000 souligne que cet avenant était « sans contrepartie » et conclu : « Le délégataire a dû percevoir un montant de plus d’un million d’euros TTC entre 2006 et 2013 au titre de la défense incendie. Ce montant semble discutable dans la mesure où il n’y a aucun service supplémentaire rendu ».
Autre point plus technique dénoncé par SP2000 : une estimation de ses charges par Véolia ne correspondant pas à la réalité technique et largement surévaluée.
Les réactions
Comment la ville a-t-elle pu laisser filer un montant équivalent à une année d’investissement à son budget depuis 2005 ? « Quand on passe un contrat en délégation de service public avec des entreprises comme Véolia, il faut une expertise en face » selon Jean-François Nicolas, vice-président du Smemac en 2013 et 2014 et qui avait lancé l’idée mi-2013 de faire appel à un cabinet extérieur pour mettre à plat tous les contrats d’eau qui allaient intégrer le Smemac. « Il faut s’interroger sur les moyens mis en œuvre dans la collectivité pour la surveillance de ces contrats. La collectivité aurait dû contrôler de plus près », confirme Guillaume Mattersdorf.
« Je pose la question : pourquoi cet avenant a été fait de telle sorte ? Nous avons posé plusieurs questions au maire au dernier conseil municipal sur les conclusions de cet audit. Nous n’avons pas eu de réponse. Et si nous n’en avons pas rapidement nous irons voir la sous-préfète », préviennent Rémy Chantegros et Lionel De Minguine. Ce dernier avait lors du conseil municipal du 22 décembre mis cet audit sur la table publique. Une première !
Hervé Bouard, délégué du Smemac et maire d’Épertully souligne une étonnante tentative d’étouffement de ce dossier au Smemac : « Lors d’un conseil syndical du Smemac en octobre, j’avais demandé des éclaircissements sur cet audit dont j’avais entendu parler. Il n’avait alors été présenté qu’au bureau. On m’a répondu qu’il n’était pas définitif. Mais au conseil syndical suivant, en décembre 2014, le bureau (NDLR : dans lequel siège 3 élus de la majorité municipale d’Autun) nous a demandé de donner quitus à la mission de Veolia en rapport des conclusions de cet audit dont nous n’avions pas eu communication ! » La tentative a avorté devant la réaction de quelques délégués.
Les réponses de Véolia, de la ville d’Autun et du SMEMAC
Ni Véolia, ni la mairie et ni le Smemac n’ont répondu directement à nos questions. Jean Simonin (Smemac) indique : « Je ne peux pas me prononcer, c’est un sujet sensible. Je peux juste vous dire que j’ai envoyé des courriers à Véolia pour qu’ils répondent à l’audit ». Audit qui date de l’été dernier. Christian Lefaix, directeur Veolia eau Bourgogne : « Tout ce que je peux vous dire est que nous préparons une réponse au Smemac ». Le maire d’Autun nous indique, à travers la copie d’un courrier adressé à Jean Simonin le 15 janvier dernier, le besoin impérieux d’attendre les réponses contradictoires de Veolia.