Massivement présents dans les rangs de la mobilisation du Printemps maraîchin ce week-end, les jeunes sont venus exprimer angoisse et colère. Certains venaient de (très) loin pour faire entendre leur voix et relier les sujets écologiques entre eux. Publié dans la Nouvelle République.
Peu importe le regard que l’on porte au sujet des bassins de rétention d’eau destinés à certains agriculteurs, la manifestation des opposants a largement mobilisé (entre 5.000 et 9.000 personnes présentes) samedi à La Rochénard. Ce succès est en grande partie à mettre au crédit des jeunes, qui fourmillaient dans le cortège.
Depuis Paris, Nantes, Lyon, Chambéry… C’est par centaines qu’ils se sont rendus dans les Deux-Sèvres, après des voyages en bus de plusieurs heures, un peu pénibles.
Sihem, la vingtaine avancée, n’est pas précisément fraîche et dispo quand elle descend du sien, qui l’a amenée de Lyon en douze heures. « Je viens parce que le désastre écologique est là et qu’il faut réagir », lâche-t-elle, décidée à se joindre sans transition à la mobilisation. Son engagement concret est récent, « parce que j’ai plus de temps à présent que j’ai fini un contrat. Le 5 mars, j’ai participé à l’action des Soulèvements de la Terre au siège de Bayer (poids lourd de l’agrochimie), à Lyon, et me voici ! »
« Je viens parce que le désastre écologique est là, il faut réagir »
Les Soulèvements de la Terre, mouvement inter-organisations qui se propose de construire un réseau de luttes locales en « impulsant un mouvement de résistance pour arracher la terre au ravage industriel et marchand » devant l’urgence écologique, sont une des organisations qui ont appelé au rassemblement de La Rochénard. « C’est chouette de voir autant de jeunes ici, contre ce symbole de l’agro-industrie que sont les bassines. C’est l’affrontement entre agriculture et agro-business », argumente Léna Lazare, 23 ans et cadre du mouvement, qui redoute les conséquences possibles sur le Marais poitevin en régionale de l’étape, ses parents habitant à La Rochelle, en plus de l’accaparement de la ressource en eau.
Problèmes d’eau similaires dans les Alpes
Un thème très familier à Aurélien, venu de Chambéry, dans les Alpes, qui milite activement « contre la construction de nouvelles retenues d’eau pour alimenter les canons à neige artificielle ». Là-bas aussi, il est question de préserver un modèle qui s’essouffle face au réchauffement planétaire, à savoir les stations de ski de basse et moyenne altitudes confrontées au manque de neige.
Lui aussi est allé grossir des rangs aussi très largement composés de locaux ou « de gens qui ont une attache dans la région, ou y sont nés, mais qui ne viennent pas souvent », constate Antoine, 24 ans et habitant à Niort. Une forme de retour aux sources.
Leçon d’histoire à La Rochénard pour les manifestants
Pour tous ces nouveaux venus à La Rochénard, une visite du château d’eau de la commune était organisée, sous l’égide de Pascal Fournier, ancien directeur de Cirque en Scène, l’association circassienne niortaise.
Accompagné d’un comédien grimé en Clodomir Arnaud, maire de 1921 à 1959, il est revenu sur l’histoire particulière de ce village « qui ne compte aucun agriculteur irriguant. L’objectif est de placer La Rochénard dans la tête des gens et de sensibiliser autour du thème de l’eau ».
C’est un point central dans l’action de l’ancien maire Clodomir, qui a modernisé sa commune bien avant d’autres, en mettant en place l’eau courante, des bains douches, l’électricité… même une buanderie ambulante. Révolutionnaire pour l’époque. Sans parler de la construction de ce château d’eau donc, d’où les visiteurs ont pu observer le dispositif sécuritaire qui les attendait lors de la manifestation, quelques heures plus tard.