C’est en toute fin de conseil communautaire que les (sept) délibérations portant sur le choix du mode de gestion de l’eau et de l’assainissement dans la CUA devaient être soumises à la sagacité des élus, ce jeudi soir. Mais avant cela, Philippe Rapeneau, président de la communauté urbaine arrageoise, aura rompu le silence qu’il s’imposait depuis trois semaines sur le sujet, tenant un point presse pour mettre les points sur les « i ».
Sans surprise, c’est bien l’option DSP (délégation de service public) qui a donc été retenue par l’institution communautaire. Mais cela ne signifie pas pour autant que, dans deux ans (au 31 décembre 2016), soit au terme du contrat qui lie la CUA à Véolia, celle-ci tiendra encore la corde. « Nous proposons ce jeudi soir un choix d’orientation », explique Philippe Rapeneau. Lequel se fonde notamment sur les conclusions d’un rapport commandé par l’institution au cabinet d’expertise Klopfer pour justifier cette position. « Mais cela ne signifie pas que c’est la DSP qui sera retenue en fin de parcours ! Si les délégataires potentiels ne répondent pas à nos exigences, et on le saura dans un an, en novembre 2015, il nous restera alors un an pour songer à un passage en régie publique ! Ce n’est effectivement qu’en juin 2016 que notre choix sera définitif. »
Si on avait le temps, pourquoi donc ne pas avoir offert aux pro-régie ce débat public qu’ils réclamaient ? Sans doute cela aura-t-il satisfait tout le monde, et ce quand bien même la CUA aurait tout de même opté pour le maintien d’une DSP… Et Philippe Rapeneau d’invoquer quand même une urgence : « Si les délibérations n’étaient pas adoptées ce soir, ça plomberait tout au regard de nouvelles dispositions législatives survenues depuis quelques années. Et on se retrouverait dans l’impasse, y compris si on souhaitait finalement passer en régie dans un an ! »
Une hypothèse que ses détracteurs estimeraient être une pure utopie, voyant en Philippe Rapeneau un anti-régie convaincu. Ce qui fait bien rire le patron de la CUA. « Je suis celui qui, en 1995, a opté pour un passage en régie sur le dossier du ramassage et de la gestion des déchets ! Alors qu’on ne vienne pas me dire que je suis un farouche opposant au système de la régie. Le problème, c’est qu’il n’est pas forcément simple à adopter dans tous les cas et dans toutes les agglos. Ça dépend de quoi on parle, des moyens dont on dispose… » Les services de la CUA avaient au passage été invités à chiffrer un éventuel passage en régie publique. Coût pour la collectivité : 9 millions d’euros, pour acheter les bâtiments, le matériel, les voitures, organiser la comptabilité, la gestion des abonnés et des factures, monter un service contentieux… « Sans compter l’embauche de 80 agents et de leur encadrement. Tout cela en période de vaches maigres et de dotations en baisse », assène Philippe Rapeneau. Lequel se gausse un tantinet de l’exposé d’Anne Le Strat, l’ex-adjointe au maire de Bertrand Delanoé ayant été chargée du passage de DSP en régie à Paris, conviée la semaine passée par l’association Eau Secours 62 à venir témoigner de son expérience : « Comment peut-on comparer le système parisien au nôtre ? Comment peut-on comparer une métropole de 2,2 millions d’habitants à une agglo d’un peu plus de 100 000 âmes ? Sachant par ailleurs que si le prix de l’eau a baissé de 8 % à Paris grâce au retour en régie, cela ne devrait pas durer. Tout le monde parie sur une inéluctable hausse des tarifs dans la capitale ! », s’agace Philippe Rapeneau. Qui s’autorise, estimant en avoir pris suffisamment pour son grade, de se moquer un peu de ses opposants d’Europe Écologie Les Verts : « Comptez combien de communes dirigées par les Verts sont passées en régie. Vous verrez bien que nul n’est prophète en sa mairie ! »
OK, mais une régie permettrait quand même, en théorie, de faire baisser le prix de l’eau pour le consommateur. C’est un bel argument, non ? « L’étude qui a été menée par le cabinet Klopfer fait état de 17 centimes d’euros d’économies au mètre cube en cas de retour à une régie. Ça fait 17 € par foyer par an. est-ce que ça vaut vraiment le coup de dépenser autant d’argent et d’énergie pour si peu de gain ? D’autant que j’espère bien qu’on obtiendra une baisse largement supérieure à 17 centimes en négociant le futur contrat ! », sourit le président de la CUA. Qui grimace ensuite : « Je n’ai jamais refusé de débattre avec eux du choix du meilleur mode de gestion. Je suis allé au-delà de ce que je devais faire, associant les élus pro-régie et les membres d’Eau Secours aux commissions. Certains, plus dogmatiques que pragmatiques, ne sont pas venus y assister et se permettent aujourd’hui, à coups de motions et de pétitions, de critiquer notre façon de faire et font de la désinformation, c’est quand même énorme ! »
Publié dans la presse locale le 20/11/2014