Côte d’Opale : le bras de fer avec Veolia est engagé pour le prix de l’eau

À Camiers comme à Étaples, la municipalité s’apprête à renégocier leur contrat de distribution et d’assainissement de l’eau. Au Touquet, la ville affirme avoir négocié une baisse de 11 %… mais les petits consommateurs paieront plus cher. Des citoyens s’investissent pour faire plier Veolia.

Qu’est ce qui peut motiver soixante-dix personnes à s’enfermer dans une salle des fêtes en plein après-midi alors que le soleil brille ? Réponse : leur facture d’eau. Samedi, Michel Lecoutre a pris le micro. Devant lui, des tas de graphiques et de tableaux compliqués. Mais la situation est simple. S’il s’adresse à l’assistance, c’est parce qu’il a créé une association il y a deux ans : l’association des riverains de Sainte-Cécile et de Camiers. Et l’objectif est limpide : « Faire plier Veolia, et faire jouer la concurrence lorsqu’il s’agira pour Camiers de renégocier le prix de l’eau. Le contrat d’affermage qui lie la commune avec Veolia se termine dans un an. Et nous voulons que ça se traduise par une facture d’eau moins lourde. »

Car Pour Michel Lecoutre, Veolia n’y va pas avec le dos de la cuillère. C’est aussi l’avis du maire de Camiers, Gaston Callewaert. « Le contrat avec Veolia a été prolongé d’un an. Un an pendant lequel on va négocier au mieux les intérêts des Camiérois. On lance un marché public et on fera marcher la concurrence. » Gaston Callewaert a tout de même réussi à arracher une baisse de 25 % sur le prix de la distribution de l’eau. « Mais ce n’est qu’une petite partie de la facture, souligne Michel Lecoutre. C’est la part de l’assainissement qui est la plus importante. » Et ce dernier dénonce l’inégalité de traitement : les petits consommateurs payent beaucoup plus cher que les gros.

Une situation qu’il n’est pas le seul à dénoncer. Au Touquet, Jean-Claude Nebout, simple citoyen, est au taquet. « La ville vient de renégocier son contrat avec Veolia et annonce une baisse de 11 % du prix de l’eau. Mais ce n’est pas vrai pour tout le monde. Au final, les petits consommateurs vont payer plus cher ! Pour quelqu’un qui va consommer 120 m3 d’eau, le m3 va lui coûter 4,33 €. Pour celui qui va consommer 10 m3, le m3 va lui revenir à 21,04 €. Ce sont les résidents secondaires qui sont pénalisés, ainsi que les personnes seules. » À la tête d’un collectif de citoyens, Jean-Claude Nebout est entré en contact avec Veolia. « Mais rien ne bouge. Ils nous répondent qu’un contrat a été signé… »

À Étaples, on s’apprête à entrer dans les grandes manœuvres. Le contrat qui lie la ville avec Veolia arrive à son terme. La facture d’eau a pris un coup de fusil. Plus 27 % pour l’assainissement.

« C’est un budget annexe qui était déficitaire. Et comme c’est un budget annexe, nous sommes dans l’obligation de l’équilibrer. J’ai hérité de la situation, explique le maire, Philippe Fait. Nous avons passé un marché pour négocier au mieux un nouveau contrat, faire jouer la concurrence et au final faire baisser les factures. » Un sacré challenge qui s’annonce.

Vers une régie communautaire ?

À Étaples et à Camiers les élus se sont demandés s’il ne valait pas mieux passer en régie municipale pour s’occuper de l’eau. Mais les maires de Camiers et d’Étaples estiment que leurs communes sont trop petites pour gérer ce genre de dossier. Voilà pourquoi ils s’estiment obligés de se tourner vers des opérateurs privés. « Mais la loi NOTRE va obliger les communautés de communes à prendre la compétence en ce qui concerne l’eau. On sera déjà plus fort, soit pour négocier avec les opérateurs privés soit pour monter une régie », souligne Gaston Callewaert.

Philippe Fait voit plus loin. « Lorsque la grande communauté d’agglomération sera née, on pourrait mettre en place une régie qui engloberait toutes les communes, avec une vraie mutualisation de moyens. Là, on aura vraiment les atouts pour mettre en place une régie. » Mais ce ne sera pas pour tout de suite…

Article paru dans la Voix du Nord

Grande-Synthe : deux heures pour comprendre sa facture d’eau

L’Université populaire de Grande-Synthe organise des ateliers ouverts à tous les citoyens curieux de comprendre ce qui se cache derrière leurs factures d’eau. Au travers de discussions, les participants découvriront les différents modes de gestion d’eau existant à Dunkerque et ailleurs, afin de déceler les secrets des réseaux de distribution d’eau.

Ces préoccupations locales seront reliées à des problématiques internationales avec pour fil rouge une question : « L’eau est-elle monnayable ? ».

À l’issue de ces ateliers est programmée, le 17 septembre, la diffusion du documentaire Water Makes Money, récompensé en 2014 par le prix Kant Citoyen du monde. Le débat qui suivra sera mené par le spécialiste de la corruption et de la gestion de l’eau, Jean-Luc Touly.

L’occasion pour tous de se forger une opinion avant le prochain débat sur le mode de gestion de l’eau à adopter à Dunkerque après la fin du contrat entre la CUD et la Lyonnaise des Eaux en 2017.

Mercredis 12, 19 et 26 août et mercredi 9 septembre de 14h à 16h, mercredi 2 septembre de 15 h 30 à 17 h 30. Université populaire de Grande-Synthe, 156, avenue de Petite-Synthe. Réservation au 03 28 29 17 63. Gratuit

Publié dans la Voix du Nord le 9 août.

 

Roybon : le projet de Center Parcs est recalé par le tribunal

Le tribunal administratif de Grenoble a annulé jeudi 16 juillet l’arrêté qui permettait de déroger à la loi sur l’eau. Les travaux du Center Parcs de Roybon ne peuvent pas reprendre.

Cette fois-ci, le projet de construction du Center Parcs de Roybon est bel est bien suspendu. Jeudi 16 juillet, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l’arrêté préfectoral déposé le 3 octobre 2014 par la Préfecture de l’Isère qui autorisait le projet de construction au titre de la loi sur l’eau. Cette décision rend illégale la poursuite des travaux dans la forêt de Chambaran (Isère). Elle va dans le sens de celle rendue par le rapporteur public en charge du dossier, le 2 juillet dernier.

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En effet, ce dernier estimait que les mesures proposées par le groupe Pierre et Vacances pour compenser les dommages environnementaux du chantier n’étaient pas suffisantes. Il demandait au tribunal administratif « l’annulation totale, immédiate et rétroactive » de l’arrêté du 3 octobre. C’est donc chose faite avec l’avis rendu par le tribunal. Un seul des deux arrêtés préfectoraux mis en cause par les opposants au projet (associations écologistes, habitants, pêcheurs), celui relatif à la loi sur l’eau, a toutefois été annulé ; l’autre recours, engagé contre l’autorisation de destruction d’espèces protégées, a en effet été rejeté.

« Les dommages écologiques seraient énormes »

Malgré ce rejet, cette décision est bel et bien ressentie comme un succès par les opposants. Pour le porte-parole de la FRAPNA (Fédération Rhône-Alpes de protection de la nature), « c’est une victoire ». Il s’agit même « d’une remise en question du modèle des Center parcs » estime Benoît Hartman, porte-parole de France Nature Environnement ; « Est-il nécessaire d’artificialiser la nature pour la faire aimer ? Préférons l’éco-tourisme qui valorise le patrimoine naturel et culturel de la France sans le détruire ».

Les pêcheurs ont également leur mot à dire. Christian Brély, président de la Fédération de la Drôme pour la pêche, réagit : « En accord avec notre mission de défense des milieux aquatiques, nous avons toujours dit que ce lieu n’était pas le bon et que les dommages écologiques seraient énormes. Nous avons été les premiers à alerter et à emprunter des voies légales il y a plus dix ans. »

Voir l’article intégral et la décision du tribunal administratif sur le site de Reporterre

La Cour des comptes étrille la gestion de l’eau

La Cour des comptes estime que les agences de l’eau n’ont pas assez maîtrisé leurs charges de fonctionnement
La gestion des aides accordées par les agences de l’eau n’est pas assez sélective. Ségolène Royal promet de renforcer les contrôles et les politiques de mutualisation

La Cour des comptes persiste et signe. Ce jeudi, les sages de la rue Cambon ont rendu public leur référé d’avril dernier sur la gestion des agences de l’eau et la réponse que lui a envoyé, début juillet, la ministre de l’Ecologie, Ségolène Royal. Le constat est sévère sur ces six établissements publics, fondements du modèle français de gestion de l’eau, calqués sur la géographie des bassins versants. Les agences perçoivent les redevances des consommateurs d’eau et distribuent les subventions aux collectivités. Elles ont perçu 2,2 milliards d’euros de redevances et versé 1,9 milliards d’aides en 2013. Entre 2007 et 2013, l’augmentation des redevances (+ 24 %) leur a procuré une « aisance financière certaine », note le rapport. Cet accroissement « ne les a pas incitées à accentuer significativement la sélectivité des aides », qui représentent 90 % de leurs dépenses.

Coûteux reclassements d’agents

« Les charges de fonctionnement n’ont pas été maîtrisées », martèle le document, avant de préciser que les dépenses de personnel ont progressé de 13 % sur la même période. Les reclassements d’agents dans la catégorie supérieure se sont en outre révélés coûteux. Les dispositifs complémentaires santé-retraite des salariés des agences n’ont plus de base légale. Ils coûtent 1.221 euros par agent et par an à l’agence Rhin-Meuse, contre 39 euros au ministère de l’Ecologie. Le référé va même jusqu’à affirmer que les agences n’ont « pas suffisamment participé à l’effort de redressement des finances publiques ».

Dans sa réponse, Ségolène Royal prend la défense des institutions, insistant sur les efforts de rationalisation des loyers et des marchés de prestation. Elle fait valoir que l’augmentation des capacités d’intervention des agences est restée limitée (2,6 % de 2007 à 2013), compte tenu de l’obligation faites aux agences de verser des subventions aux agriculteurs pour la lutte contre les phytosanitaires et surtout des prélèvements de l’Etat. Il est vrai qu’en 2014, comme depuis de nombreuses années, Bercy a ponctionné 210 millions d’euros sur les moyens des agences. Un nouveau prélèvement de 175 millions est prévu chaque année entre 2015 et 2017.

Recherche de nouveaux redevables

Sur le fond, les reproches de la Cour sont pourtant sévères sur la gestion des redevances et des aides. Le processus d’instruction et d’attribution des subventions est « insuffisamment documenté et difficilement traçable ». Des aides ont pu être versées à des bénéficiaires débiteurs à l’égard des agences, ce qui est théoriquement interdit.

Enfin, la Cour pointe le peu de moyens consacrés à la recherche de nouveaux redevables. Une association qui s’occupe de restauration des cours d’eau et qui emploie des personnes en difficulté a par exemple reçu 6,4 millions d’euros de l’agence de l’eau Seine Normandie entre 2007 et 2012. « La mise en place d’équipes dédiées à la fonction de contrôle et notamment au contrôle interne est en cours  », plaide la ministre. Pas de quoi satisfaire ceux qui dénoncent les déséquilibres du financement de l’eau en France, assuré aux trois quart par les usagers particuliers alors qu’une bonne partie des nouvelles pollutions proviennent de l’agriculture et de l’industrie, entraînant un gonflement des coûts de traitement.

Publié dans Les Échos du 17 juillet

Bordeaux Métropole enterre le retour de l’eau en régie

Le conseil de Bordeaux Métropole a voté ce vendredi (63 voix pour, 41 contre) le principe d’affermage pour la gestion de l’eau potable et de l’assainissement. Il écarte ainsi l’hypothèse d’un retour en régie de ces services, avancée sous la précédente présidence du socialiste Vincent Feltesse.

Suite à des études comparatives des différents scenarii, l’agglomération préfère laisser leur exploitation au privé, après expiration des délégations de service public (DSP) actuelles, fin 2018 pour l’eau et fin 2021 pour l’assainissement. Le concessionnaire actuel est la Lyonnaise des eaux.

« Compte tenu de l’énorme charge de travail qu’entraîne la mutualisation, ce n’est pas le moment de gérer aussi en direct l’eau et l’assainissement, justifie Alain Juppé, président de Bordeaux Métropole. Le contrat d’affermage a l’avantage d’être de courte durée – 6 ans, contre 30 pour la DSP, et de ne pas être irréversible, contrairement au passage en régie. Et le schéma est très différent de la DSP puisque le fermier se contentera d’exploiter le réseau, les investissements resteront du ressort de la métropole. »

Au terme d’un tour d’horizon des agglomérations comparables, les élus de Bordeaux Métropole ont aussi retenu « qu’il n’y a pas de lien probant entre mode de gestion et prix de l’eau ».

Selon certaines estimations, au contraire, la facture de l’eau serait de 10% à 20% moins chère en régie. C’est d’ailleurs un des arguments avancés en conseil par Alain Anziani : selon le premier vice-président socialiste de la métropole, dans les 15 villes de plus de 100 000 habitants où l’eau est la moins chère en France, 13 disposent d’une régie.

Le maire de Mérignac fait aussi valoir que la métropole, qui va intégrer 2000 agents en deux ou trois ans avec la mutualisation des services, pourrait parfaitement intégrer les 550 salariés de la Lyonnaise concernés en 6 ou 7 ans.

La majorité Communauté d’avenir a écarté cette option. Le groupe socialiste a quant à lui voté contre l’affermage, tout comme les communistes et les écologistes. Président du groupe EELV, Gérard Chausset déplore que le « contrat léonin avec la Lyonnaise » ait fait perdre « des centaines de millions d’euros à la collectivité », jusqu’à la décision d’Alain Rousset, alors président de la CUB, de renégocier avec l’entreprise. L’élu écologiste regrette en outre la décision de la majorité précédente d’avoir préféré attendre 2019 pour passer les deux contrats en régie, quand elle aurait pu municipaliser tout de suite l’assainissement.

Publié par Rue89 Bordeaux